Cassandre ‒ 20 ans le ‒ 5 ★★★★★
✎ « Une très belle histoire… »
« Aila et la Magie des Fées », un joli titre qui n'attirait pas spécialement ma curiosité…
Si j'avais su un jour qu'un livre de fantasy allait me rendre autant adepte de la lecture, je ne l'aurais pas cru. On pourrait croire à un livre pour fillettes rêvant de magie et d'univers parallèles, pourtant je dirais que c'est un livre qui en passionnerait plus d'un, tous âges confondus. Un livre magnifiquement bien écrit, qui révèle des détails qu'on ne pourrait imaginer…
Je me lance… j'ouvre le livre, je commence à lire quelques pages, 13, 20, 35… je dévore toutes ces lignes à une vitesse folle. Et voilà maintenant que je le prends dans le bus le matin, à ma pause déjeuner, le soir pour rentrer, et juste avant de me coucher. Je tourne les pages plus vite que mon ombre et naît un sentiment d'impatience de connaître la suite.
Au fil de l'histoire, je me suis complètement identifiée à l'héroïne ; elle était moi et j'étais elle. C'est comme si nous ne faisions qu'un. Une sensation qui reflète ma façon d'agir, de penser, de vivre… une aventure que j'ai lue et surtout vécue intérieurement pendant mes quelques jours de lecture passionnée.
Je le relirai encore avec plaisir et avec les mêmes sentiments que la première fois ! Un livre à l'avenir tout tracé que je conseillerai à tous mes proches !!!
Anne-Claire ‒ 35 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Expérience de lecture riche et profonde »
Parler d'Aila et la Magie des Fées est pour moi difficile, tant cette expérience de lecture a été riche et profonde. J'ai eu la chance inouïe de pouvoir lire le roman en feuilleton au cours de son écriture et il m'a tenu des mois en haleine, dans une attente continue et jamais déçue. Encore aujourd'hui, quand j'ouvre le premier tome, je suis happée par le récit et n'arrive pas à lâcher le livre avant d'en avoir relu chaque ligne.
J'aime le foisonnement de ses personnages, chacun si différent et tous si attachants, complexes et emplis d'humanité : Aila, Adrien, Pardon, Aubin, Hubert, Lomaï, Hamelin, Hang et tant d'autres.
J'aime la façon dont on voyage au gré des aventures, dans des royaumes nouveaux que l'on apprend à connaître ; certains deviennent si familiers au cours du récit qu'on les quitte à regret et qu'on les retrouve avec joie.
J'aime la façon dont on est entraîné vers des mondes insondables, dans le jardin des fées, au cœur des esprits humains, sur la spirale étroite des souvenirs…
J'aime les pouvoirs poétiques dont Aila est dotée par les fées, et qui me font rêver : projeter son esprit pour prévenir les dangers, fabriquer des boucliers d'amour, entendre à distance les appels à l'aide… Mais tous ces pouvoirs ne font pas d'Aila une « superwoman », loin de là, et c'est l'un des charmes profonds de cette histoire : Aila est une héroïne qui grandit, qui aime, qui doute, qui refuse son destin, qui se bagarre avec elle-même et qui, en ce sens, est incroyablement humaine.
J'aime enfin la façon magistrale dont le récit se construit, dévidant les bobines de multiples aventures en autant de fils qui se coupent, se nouent, se perdent, et qui tissent pourtant un tableau cohérent, que l'on découvre avec stupeur dans les dernières pages… Mais chut ! Tout le monde n'a pas encore eu la chance d'aller au bout de l'aventure. Par les fées, on n'en ressort pas indemne !
Emmanuelle ‒ 30 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Accro ! »
Olala !!!!!
Rien que le premier chapitre, et j'étais déjà accro !!!
Ce qui est vraiment génial, c'est d'avoir pris plein de thèmes et histoires qui font partie de notre inconscient imaginaire et d'en avoir fait quelque chose de neuf !
Le tour de force de Catherine, c'est de parvenir à dévier ces éléments pour créer son propre monde et, ainsi, de générer un plaisir double pour le lecteur : celui de revivre un imaginaire de l'enfance dans un autre. Tout est vraiment bien écrit et très fluide (et merci d'employer le subjonctif imparfait !!! J'adore ce temps qui ajoute un côté féerique et intemporel, justement typique du conte).
Aucune pesanteur, les personnages, leur origine, tout est bien posé en douceur et, pourtant, au milieu de péripéties palpitantes ! Le rythme est parfait !
C'est super bien ficelé, drôle, et, de plus, étonnamment d'actualité ! (toute la description d'Avotour, des problèmes causés par la misère, l'angoisse de ce qui va survenir…) Bref, je suis toujours aussi fan !!!
Didier ‒ 53 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Ça ne s'arrête plus jamais ! »
Eh bien, si je m'attendais un jour à donner mon avis sur un livre de fantasy, moi qui ne lis que des magazines d'économie, quelques bandes dessinées, un ou deux ouvrages (sérieux) par an, et jamais de fantasy.
J'ai été fortement incité à parcourir Aila et la Magie des Fées et je ne le regrette absolument pas.
Une fois le prologue avalé, je pénètre dans un roman qui débute à la fois doucement (un environnement bien brossé, une fine description des personnages ‒ aux caractères très affirmés ‒ qui offrent tous un élément auquel s'attacher, une subtile entrée en matière des fées, par touches imperceptibles) et rapidement avec de l'action dès le premier chapitre ‒ ça ne s'arrête plus jamais ‒ et des dialogues d'une incroyable pétulance.
Pas moyen de s'interrompre une fois qu'on a mis le doigt dans ce livre…
Olivier ‒ 40 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Un monde féerique envoûtant »
Un monde féerique envoûtant, une histoire passionnante qui vous tient en haleine de la première jusqu'à la dernière ligne. On vit des émotions intenses avec Aila ! J'ai autant dévoré les livres de Boullery que ceux de Goodkind, Tolkien ou Martin.
Lisez les trois premiers chapitres : vous ne pourrez plus vous arrêter !
Adrien ‒ 27 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Hâte de découvrir la suite »
J'ai eu le privilège de découvrir en avant-première les aventures d'Aila. Elles m'ont tenu en haleine pendant plusieurs jours, c'est ce genre de roman qu'on peine à refermer tard le soir, mais dont on essaie d'économiser certains chapitres pour le lendemain !
J'ai hâte de découvrir la suite et suis ravi d'apprendre que d'autres personnes découvriront cet univers vraiment particulier et attachant.
Bonne lecture à tout le monde !
Yollande ‒ 45 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Époustouflant »
Je suis en train de relire Aila et la MAGIE est toujours là. C'est époustouflant, car je sais que, dans un an, dans dix ans, il y aura toujours cette magie que je me régalerai à redécouvrir. Ce livre enchanteur, envoûtant, fait partie de ceux qui me sont « intemporels » et dont le plaisir de la relecture reste toujours aussi fort : on s'attache à Aila, on se l'approprie, on vit sa vie au fil des mots, au fil des pages, on la voit grandir comme un enfant (on en est fière n'est-ce pas, Catherine ?) et on en redemande encore et encore. Et on se dit qu'on sera patiente comme jamais pour connaître la suite, mais surtout, surtout, ne jamais connaître sa fin !
Tous les ingrédients sont là : l'amour, l'amitié, la fidélité, le courage, l'aventure, l'espérance, les joies et les peines, le doute, l'angoisse, la violence, la mort…Exercice de très haute voltige. Je suis très touchée d'avoir eu le privilège de lire le 1er tome il y a un an et je n'ai plus qu'un mot à dire : longue vie à Aila.
Guillaume ‒ 31 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « De 10 à 90 ans »
Catherine Boullery réenchante la saga fantastique en trempant sa fine plume dans la clarté du conte.
Les fluides aventures d'Aila sauront sans aucun doute poser leur charme puissant sur les enfants de 10 à 90 ans : un sort suffisamment puissant pour tenir en haleine au fil d'une histoire-fleuve.
Virginie ‒ 36 ans ‒ 5 ★★★★★
✎ « Aila, un personnage inachevé qui est encore en train de grandir »
Qu'est-ce qui m'a plu dans Aila et la Magie des Fées ?
C'est un roman de fantasy qui reprend les codes des romans de chevalerie et des contes merveilleux. On est bien dans un univers médiéval avec ses étendues désertiques, ses forêts et ses châteaux. On retrouve le merveilleux avec les fées - surtout la petite Amilys - les dons que l'héroïne apprend peu à peu, les sorciers qui rôdent.
Mais ce qui est intéressant, c'est que contrairement à d'habitude - où ceux qui sont dotés de qualités de combat, d'une volonté d'indépendance, ce sont des chevaliers - ici, dans ce livre, c'est une femme, Aila, qui reçoit toutes les caractéristiques des héros : combattante efficace, elle sait manier les armes, et peut se montrer fine stratège. Cela donne de la profondeur au personnage, et le roman a une coloration féministe en montrant comment une très jeune femme peut s'affirmer dans un monde d'hommes et instaurer un nouveau rapport à autrui. Ce n'est d'ailleurs pas la seule femme à jouer un rôle important.
Autre chose : Aila est un personnage amusant et touchant, parce que contrairement à certains héros de fantasy, elle est un personnage inachevé : elle est encore en train de grandir, elle est souvent montrée en train d'apprendre à devenir une guerrière, on la voit même être très naïve, faire des erreurs importantes, et se méprendre sur les intentions d'autres personnages. C'est rassurant, ou réaliste, comme on veut, de découvrir un personnage qui n'est pas auréolé de toutes les perfections.
L'histoire d'Aila, c'est aussi l'histoire d'une jeune fille abandonnée, qui n'a pas toujours reçu l'affection parentale dont elle aurait eu besoin, et qui se forge une solidité par d'autres moyens. L'importance de la filiation, la contradiction qui existe entre le lignage et le talent, apparaît à de nombreuses reprises, que ce soit chez Aila ou chez d'autres personnages. C'est l'importance de l'éducation qui est ici démontrée.
Les complots et tractations à l'intérieur des cours des châteaux sont aussi un thème important : on peut lire une réflexion sur le pouvoir et sur les modes de gouvernement. Ainsi, les actions humaines ont autant de place que la magie : Aila instille la volonté, chez les princes et les rois, de sortir de leur passivité, d'arrêter d'attendre une évolution extérieure, et de réfléchir par eux-mêmes à la manière de mieux gouverner leur pays et d'améliorer les conditions de vie de leur peuple.
C'est surtout un roman sur la disparition de la magie, qui raconte comment les hommes ont fait en sorte que les fées disparaissent de leur univers, et quelles difficultés ils rencontrent depuis. Les fées elles-mêmes semblent accepter leur extinction, et pourtant tout le livre nous montre leur rôle fondamental. Seuls quelques personnages ont encore l'intuition que la magie peut encore exister : quelques mages, mais aussi Aila qui possède un livre grâce auquel les fées partagent leur savoir.
Or, cette magie ne peut disparaître, et cela nous est prouvé doublement : parce qu'elle aide à sauver le monde dans l'histoire racontée par le livre, mais aussi d'une autre manière : elle est peut-être fée, l'auteure de ce livre, car son livre agit sur le lecteur comme celui des fées sur Aila ; on se sent comme aspiré par une histoire qu'on ne veut plus quitter et qui s'offre très facilement à la lecture. Comment mieux affirmer que les livres et la lecture font ressusciter la magie et peuvent réenchanter notre monde ?»
Toutes les histoires ne commencent pas de la même façon, sauf les contes de fées, alors…
Il était une fois le pays d’Avotour où il faisait bon vivre. Bordée à l’ouest par la montagne et bercée à l’est par la mer, cette contrée bénie reflétait un juste équilibre en toutes choses : le chaud et le froid, les plaines et les vallons, les prés et les forêts. La légende racontait que, pendant des siècles, les fées y avaient vécu en harmonie avec les hommes, et cette entente aurait pu durer pour l’éternité grâce au respect d’une seule et unique règle : l’amour entre une fée et un homme ne pouvait exister. Malheureusement, ce qui était défendu arriva : un regard suffit à deux êtres égarés pour s’aimer et transgresser l’interdit absolu. Fées, familles et amis cherchèrent à les séparer, mais sans aucun succès. Les amants connaissaient pourtant la fin terrible qui les attendait, le corps de l’un distillant un poison à l’autre, mais ils la préférèrent à une vie où ils ne seraient plus unis. Isolés, désavoués, ils finirent par s’enfuir, quittant leur pays pour un lieu lointain et perdu où, de leur amour illicite, naquirent des jumeaux. Conscients de leur condamnation par le mal qui les rongeait de l’intérieur et empirait chaque jour, alors, tant qu’ils le pouvaient encore, ils embrassèrent leurs descendants une dernière fois, les confièrent à la Terre, puis, main dans la main, avancèrent dans l’eau d’un lac noir pour y mourir ensemble. Ainsi s’acheva cet amour interdit. Mais se doutaient-ils qu’ils venaient de bouleverser l’avenir de façon irréversible ?
Les fées et les hommes d’Avotour, qui les recherchaient depuis leur fuite, ne retrouvèrent que leurs corps sans vie, au fond du lac, enlacés à tout jamais. D’une pensée, les fées cristallisèrent les deux amants en hommage à leur passion, en dépit de la folie dont elle était empreinte, pour que jamais un tel drame ne se reproduisît entre les deux peuples. Des bébés, personne ne trouva trace ; ce fut comme s’ils n’étaient jamais nés. Peut-être étaient-ils finalement morts du même mal que leurs parents…
À la suite de ce triste événement, au pays d’Avotour, il fut conté qu’hommes et fées prirent une grave décision : elles continueraient à vivre près d’eux pour les protéger, mais deviendraient invisibles à leurs yeux, évitant ainsi toute nouvelle tentation. Il fut également dit qu’un jour les fées reviendraient parmi les hommes afin de sauver le monde quand elles auraient donné leur pouvoir en héritage à un être humain.
Et la vie poursuivit sa course, insensible à cette douloureuse séparation… En Avotour, les fées avaient disparu depuis trop longtemps et ses habitants avaient fini par oublier tout le bien qu’ils leur devaient. D’elles ne restèrent que des légendes infinies, de celles que les troubadours contaient dans les auberges ou sur les places publiques, dans le silence curieux et recueilli de la population. Ainsi, le temps effaça tout souvenir des mémoires et seuls quelques rares exaltés continuèrent à croire en leur existence. Comme le symbole d’une époque révolue, elles n’apparurent plus que dans la devise du royaume : « Pays des fées, Avotour fut, est et sera » et dans quelques expressions populaires.
Alors qu’un terrible danger étendait son ombre sur la Terre, sous la forme de mille tentacules d’une noirceur effarante, notre histoire commença : celle d’une jeune fille comme les autres, ou presque, mais que quelqu’un, quelque part, avait retenue pour un destin exceptionnel. La journée se terminait et Aila était assise sur une pierre. Elle était assez grande pour son âge et ses cheveux noirs, nattés en une longue tresse, tombaient dans son dos, tandis que des larmes bordaient ses yeux aux pupilles sombres. Du haut de ses seize ans, elle portait sur ses épaules un fardeau bien trop lourd pour une si jeune demoiselle. Comment avait-elle réussi l’exploit de naître en perdant tout ? Et comment pourrait-elle réparer le tort qui lui avait été causé ? Être la fille d’un des combattants les plus valeureux du royaume d’Avotour et ne pas exister à ses yeux constituaient sa triste réalité… Son père, Barou Grand, était un géant à la barbe rousse et au regard bleu, un homme aussi haut que large, animé par une force herculéenne. Vingt ans auparavant, un petit groupe de Hagans, barbares sanguinaires d’un pays frontalier prêts à les envahir, attaqua le carrosse qui transportait Mélinda, la châtelaine d’Antan — un comté d’Avotour — et sa dame de compagnie, Efée. Le hasard décida que, Barou, passant par là entouré par une poignée de compagnons, fut celui qui les avait secourues. À neuf contre vingt, ce colosse trucida à lui seul dix guerriers hagans sous les regards épouvantés, mais émerveillés de ces dames, alors qu’il ne voyait que les yeux noirs et brillants de l’une d’entre elles, une jeune femme brune au sourire enchanteur. Après les avoir mises en sécurité, il remporta les combats déterminants des dernières grandes batailles qui sauvèrent Avotour. Les hommes qui combattaient à ses côtés l’auraient suivi les yeux fermés, même dans la mort, tandis que sa valeur et son courage devenaient les plus beaux symboles du pays. L’histoire retint que l’amour porta le futur grand héros à vaincre les Hagans, qui se tenaient tranquilles depuis cette victoire. Il ne lui resta plus ensuite qu’à gagner le cœur de la demoiselle aux prunelles sombres.
Honoré pour ses exploits par le roi et Avotour, il reçut en récompense un titre et un manoir qu’au lieu d’occuper il mit en fermage pour partir s’installer à Antan et courtiser Efée. Cette dernière ne tarda pas à succomber, avec grâce, à cette cour discrète et attachante, puis à l’épouser six mois plus tard avec la bénédiction des châtelains du comté, Elieu et Mélinda. Ils demeurèrent au château où Barou fut nommé maître d’armes, pour la plus grande fierté de tous ses habitants. Sa célébrité attira de jeunes seigneurs en quête de reconnaissance, amenant le héros à créer une école destinée à les former. Petit à petit, un immense terrain d’entraînement fut érigé à Antan, qui s’enrichit par la suite d’un manège, puis d’un champ de courses, afin de satisfaire tous les besoins. Comme quoi il fallait peu de choses pour que le bonheur devînt réalité… Quelle fille ne serait pas fière d’avoir un père comme celui-ci ?
Aujourd’hui, sa vie semblait sans avenir à Aila. Et pourtant, tout aurait pu devenir tellement merveilleux : enfant désiré, enfin, en apparence, une mère dévouée et adorable, un père impatient de chérir son héritier qui fut, de fait, une héritière… Et là, tout bascula : à l’instant où il découvrit qu’elle n’était qu’une fille, Aila disparut de son existence comme si elle n’était jamais née. Sur le moment, Efée, fatiguée par l’accouchement, n’avait pas compris à quel point la cassure se révélait irrémédiable. Elle avait fait de son mieux, par la suite, pour entourer son enfant d’amour, espérant ainsi compenser l’attitude déconcertante de son mari. Autour d’elle, elle avait sollicité toutes les personnes qu’elle appréciait pour protéger sa fille, déniée par son père. Mélinda, la châtelaine d’Antan, la prit régulièrement avec ses enfants, comme un des siens. Hamelin, le mage du château, devint son précepteur. Lui qui ne s’intéressait à rien d’autre qu’à ses grimoires avait été séduit par ce bébé. Séduit était-il le terme approprié ? Interloqué ? Fasciné ? Toujours était-il que ce fut probablement la seule fois de sa vie où il vint tapoter avec douceur la tête d’un nouveau-né, le regard empreint d’une gravité soudaine. Et, surtout, il y eut Bonneau, son oncle, le frère de son père qui, jour après jour, prit sa petite nièce un peu plus à l’abri de son aile.
Efée, partagée entre deux amours, ne comprenait pas comment Barou pouvait se conduire en mari enflammé, tendre et prévenant, alors que, simultanément, il affichait une indifférence insoutenable dès qu’il s’agissait de sa fille. Tandis qu’elle se remettait péniblement de la naissance, elle percevait le déchirement que représentait pour son époux l’absence d’héritier mâle. Loumie, l’accoucheuse d’âmes, lui avait, avec la plus grande fermeté, déconseillé une autre grossesse, mais Efée y songeait pour rétablir l’équilibre qui avait disparu dans sa vie. Elle voulait une famille, une vraie, avec un père pour ses enfants. Que s’était-il donc passé dans la tête de cet homme, droit et honnête, pour en arriver à rejeter son unique fille ? Essayant une nouvelle fois d’en découvrir la raison, elle avait poussé suffisamment loin la discussion pour que Barou bloquât définitivement toute tentative d’en parler plus avant. Elle ne l’avait jamais vu dans cet état, animé d’une colère glaciale et tranchante, incontournable, insurmontable. Alors, une bonne année après la naissance d’Aila, malgré les réticences de son mari et l’opposition farouche de Loumie, elle tomba de nouveau enceinte, l’espoir vibrant au fond de son cœur de tout réparer en accouchant enfin d’un garçon.
La vie quotidienne d’Efée s’était naturellement divisée en deux. Quand le soir venait, elle confiait sa fille à son oncle, tandis que, dans la journée, elle s’en occupait pendant que son époux assurait son rôle de maître d’armes. Il était son champion et excellait dans tous les types de combats. Aucune arme blanche ne recelait de secrets pour lui et il était un combattant à mains nues hors pair. Vénéré par ses élèves, respecté par ses pairs, ce héros n’attendait qu’un fils pour marcher dans ses traces. Efée le savait, elle lui donnerait ce garçon tant espéré ! Après, tout irait mieux. Au fur et à mesure que sa grossesse avançait, elle se sentait de plus en plus épuisée et Loumie, inquiète, lui rendait visite fréquemment pour évaluer son état. Quand la future mère ne réussit plus à se lever, Mélinda vint prendre de ses nouvelles chaque jour, récupérant Aila pour la ramener parmi ses enfants. Bonneau, lui aussi très présent, soulageait Efée : il emmenait la petite fille s’occuper des chevaux en la fixant sur son dos avec une pièce en cuir qu’il nouait sur sa poitrine. Cette façon de procéder fit sourire tous ceux qui le croisèrent, mais personne ne s’en moqua. Tous respectaient cet oncle qui se comportait mieux qu’un père.
Bonneau, frère de Barou, ne lui ressemblait pas. Certes grand, il n’avait rien d’un colosse. Il avait hérité d’une teinte de cheveux plus sombre que celle de son frère et d’une carrure plus modeste qui ne l’empêchait pas de l’égaler en force. Comme lui, il avait développé une agilité extraordinaire, doublée d’un impressionnant sens de l’équilibre. En sa compagnie, une des premières chutes d’Aila se termina dans un magnifique tas de fumier bien frais, au profond désespoir de l’oncle. Cependant, il se débrouilla tout seul pour la nettoyer des pieds à la tête et la rendit à sa mère propre comme un sequin neuf… Quand l’histoire, qui circula autour du château, revint aux oreilles d’Efée, elle commença par sourire avant d’éclater de rire. Elle eut l’intime conviction que sa solution de rechange était la bonne et que Bonneau deviendrait l’homme de la situation. Sa détermination à protéger Aila s’en trouva alors renforcée.
Quand arriva le moment de la naissance, Aila venait de fêter ses deux ans et demi. En digne futur père, Barou se précipita au chevet de sa femme et ne la quitta plus, malgré Loumie qui ne cessait de le houspiller. Par les fées, un homme n’avait rien à faire là ! Mais, bon gré, mal gré, elle fut bien obligée de tolérer sa présence, car il voulait rester à tout prix. Enfin, le fils tant attendu naquit et le couple savoura un bonheur inoubliable. Barou resplendissait et Efée sentit l’espoir renaître en elle avec l’arrivée de ce petit garçon. Pour sa part, Loumie se montrait plus taciturne que jamais. Cependant, comblés, les nouveaux parents ne prêtèrent aucune attention à son mutisme marqué.
En une seule nuit, Efée perdit toutes ses illusions ; la naissance d’Aubin n’avait rien changé à l’attitude dédaigneuse de Barou envers sa fille qui ne représentait pas plus aujourd’hui qu’hier, et elle en ressentit un désespoir profond. Elle adorait son mari, mais sa réaction créait une blessure insupportable dans son existence qu’il ne paraissait ni entendre, ni comprendre. Elle se sentait si fragile qu’elle décida que, dès maintenant, elle devait agir pour le bien d’Aila. Malgré sa faiblesse, elle écrivit plusieurs lettres, ses enfants à ses côtés, pour profiter de leur présence tant qu’elle le pouvait encore. Toute à son projet, elle reçut Mélinda, puis Bonneau et, enfin, Hamelin. Le déclin de ses forces ne l’empêcha pas de passer avec chacun beaucoup de temps à convaincre et planifier. Son élocution devenait difficile, sa respiration hachée, mais elle se devait d’achever sa démarche : l’avenir de sa fille était en jeu. Au désespoir de voir l’état de la dame de son cœur se dégrader chaque jour davantage, Barou désertait ses heures d’entraînement pour être à ses côtés. Personne n’aurait songé à lui en adresser le moindre reproche, tant leur amour était cité en exemple en Avotour. Pour éviter des croisements critiques, Efée avait chargé Loumie, si présente auprès d’elle, d’escamoter Aila avant chacune des arrivées de son père. Une paix apparente au sein du foyer fut ainsi préservée…
Efée augurait sa mort proche, c’était juste une question d’heures… Elle avait réalisé tout ce qu’elle pouvait pour Aila, mais son cœur n’en battait pas avec plus de légèreté pour autant, car elle abandonnerait son mari, ses enfants, dont sa fille qui avait tant besoin de sa tendresse. Comment Aila, qu’elle chérissait, arriverait-elle à grandir en force et en confiance malgré l’ombre de Barou ? Quand la vie ne tint plus qu’à un souffle dans sa poitrine, Efée jeta un dernier regard vers l’homme qu’elle avait aimé plus qu’elle-même, sa main posée sur la sienne, sourit à Aubin que Barou berçait dans ses bras, et pressa contre elle une poupée de chiffon, cachée sous les couvertures, symbole de l’amour qu’elle éprouvait pour sa fille. Soudain, sa lumière intérieure s’éteignit, plongeant le cœur de ceux qui l’estimaient dans de profondes ténèbres…
Le château porta son deuil, tandis que la douleur terrassait ce géant de Barou, avec cruauté. Cependant, entouré par ses amis et serrant son fils contre lui, il décida de poursuivre sa route pour son enfant, dans la mémoire de sa merveilleuse femme.
Définitivement chassée de l’habitation familiale, Aila s’installa chez Bonneau, dans la maisonnette attenante aux écuries. Elle essayait de comprendre avec son cœur de petite fille de presque trois ans où était passée sa maman, pourquoi elle avait un frère avec lequel elle ne vivait pas et un père qui ne la regardait jamais. Comme elle ne trouva aucune réponse, elle se renferma sur elle-même et cessa de parler. Pourtant, son oncle se dévoua pour sa nièce, mettant tout en œuvre pour qu’elle se sentît chez elle. Dans son unique pièce, il lui aménagea une chambre, séparée de la partie commune grâce au paravent offert par Mélinda. Pour la meubler, il lui donna son lit et son armoire. Ensuite, après avoir percé un trou dans le plafond, il se créa un minuscule endroit dans les combles pour y dormir, accessible par une échelle. Chaque jour, il prenait soin d’elle comme s’il s’agissait de sa propre fille, la nourrissait, l’habillait, la sortait. Elle l’accompagnait lorsqu’il s’occupait des chevaux ou qu’il s’entraînait au kenda, un bâton de combat peu répandu comme arme au royaume d’Avotour. Il passait ainsi des heures le soir à répéter inlassablement des figures qu’il réalisait même en chevauchant, sous le regard attentif d’Aila qui ne se plaignait jamais. De fait, elle n’en perdait pas une miette, enfin, quand elle ne s’endormait pas à même le sol, vaincue par la fatigue. Il lui apprit à monter à cheval, à les dresser et à les soigner. Il lui enseigna les herbes, les mélanges, les massages et, sans un mot, elle retenait et reproduisait.
Hamelin, le mage, éprouva plus de difficultés pour s’habituer à donner des cours à une enfant qui demeurait silencieuse pendant l’apprentissage de la lecture. Cependant, quand elle levait ses grands yeux, aussi noirs que ceux de sa mère, où brillait cette immense lueur d’intelligence, il savait que son mutisme ne l’empêchait pas de comprendre. Alors, il continuait ses leçons comme si de rien n’était. Il vérifiait de temps à autre ce que signifiait son regard avant de poursuivre ou de recommencer. Elle apprit très vite à écrire et à calculer. Il lui donna des livres à lire pour une semaine qu’elle lui rapportait le lendemain ou le surlendemain. S’il fut plus que surpris de sa rapidité à déchiffrer et à acquérir tout concept, il en accepta l’idée et lui offrit son enseignement avec enthousiasme. Lui, que les enfants agaçaient passablement avec leurs intarissables bavardages et leur aptitude prononcée à ouvrir la bouche pour brasser de l’air, se trouvait plus qu’heureux de cette petite fille qui se taisait… Il décida de partager tout son savoir et entreprit de lui inculquer ses connaissances sur les plantes, l’anatomie, les langues des différents pays voisins, l’histoire, les sciences, les lois et tant d’autres notions et expériences qui le passionnaient. Impassible, elle le suivit dans les dédales de son érudition, même, lorsqu’emporté par un sujet, il sautait du coq à l’âne.
En dépit de son silence, Aila était acceptée de tous et aussi appréciée ; elle grandissait, serviable et agréable, malgré de rares sourires… Tout en le regrettant, chacun mettait son mutisme sur le compte de toutes les épreuves qu’elle avait traversées. Seuls les élèves de son père la rejetaient sans sourciller. Ils avaient choisi leur camp, celui de Barou et, si leur maître ne voulait pas d’elle, c’était qu’elle n’en valait pas la peine ! Il ne fallait pas qu’elle approchât la zone d’entraînement de trop près : elle y recevait railleries et quolibets auxquels elle ne pouvait répondre. Mais c’était plus fort qu’elle. Elle cherchait à entrevoir son père, ce héros, et à voir grandir Aubin qui ne quittait pas son géniteur d’une semelle. Il se comportait comme son ombre, mais en plus petit… Si son frère faisait de son mieux pour imiter Barou, Aila, rien qu’en le regardant, était persuadée qu’il n’en révélerait jamais le même talent. D’où tenait-elle cette certitude ? Elle l’ignorait, mais, pour elle, Aubin ne manifestait pas cette énergie rayonnante que dévoilait l’âme des grands…